“Les Bienveillantes”, Jonathan Littell, Gallimard/Folio

Ce livre étourdissant, abyssal, c’est penser et vivre de l’intérieur les idées, les sentiments, la psyché d’un intellectuel nazi. Pire qu’un SS. Un théoricien de la supériorité aryenne, de l’eugénisme, de l’antisémitisme. Un fou convaincu de la pureté de sa tâche, de sa mission sacrée au service du peuple allemand. Un fou, certes, un monstre, mais tout sauf froid: un homme avec son histoire, une enfance, des amours, des parents… Parce qu’ôter la “qualité” d’humain à un homme, c’est commode pour qualifier l’inqualifiable. Pour le lecteur, c’est l’immersion dans la folie à la première personne du singulier. Nous sommes lui. Je suis lui. Noyade assurée.
Le génie de Littell, c’est de nous tenir en laisse, en sueur, et de nous emporter jusqu’au bout, plus loin que l’Enfer, pour un voyage sans retour.
Pour moi, ce furent quatre jours (je n’ai rien fait d’autre que lire…) inoubliables dans ma vie de lecteur.
– Frédéric –