“Les saisons”, M. Pons, Christian Bourgois
Rarement la scène finale d’un roman ne m’aura hantée autant. Quelle claque ! « Les saisons » est de ces livres dont il y a un « avant » et un « après » la lecture, et à côté desquels on ne comprend pas comment on a pu passer si longtemps. Le genre de récit qui à la fois vous heurte et vous révulse un peu, mais vous trotte dans la tête toute la journée jusqu’à ce que vous puissiez rentrer chez vous le poursuivre… c’est fascinant d’être capable d’écrire des mots si beaux pour dépeindre des choses si monstrueuses… !
Siméon arrive en étranger dans le village perdu d’une vallée qui ne connaît jamais que 2 saisons : un automne où il pleut sans discontinuer pendant 16 mois et puis, pendant 40, un hiver où il gèle à pierre (et corps) fendre. Le nouveau-venu tente de se faire à l’âpreté du climat comme à la rudesse des mœurs étranges des habitants, avec comme espoir auquel se raccrocher le trésor le plus précieux qu’il possède : une rame de papier sur laquelle il est destiné à coucher son chef d’oeuvre d’écrivain.
Difficile de classer cet ovni.. sous certains aspects il peut ressembler à un ‘Rapport de Brodeck‘, aux univers de J.Abeille, J. Bosch, Kivirähk, Kafka, Rabelais, Baudelaire, à du réalisme magique… Mais envers et contre tout, il reste tout à fait bizarre et singulier, et c’est ce qui fait son génie. Une petite perle un peu cabossée mais non moins éclatante ! Maurice Pons est un impressionnant chantre de la misère humaine, un poète de la laideur, un magicien des mots et des maux.
Ames sensibles s’abstenir ! Pour les autres : laissez-vous retourner, prendre aux tripes et emporter dans les profondeurs et les nuées d’un récit dont vous ne ressortirez pas tout à fait comme avant.
– Nikita –
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