Un long voyage

« Un long voyage », C. Duvivier, Aux Forges de Vulcain

Voici un texte d’une puissance évocatrice rare, et pourtant tout se fait avec une finesse telle qu’il suffit de se laisser bercer pour que le charme de sa magie douce opère. Le meilleur roman de fantasy que j’aie lu depuis un moment, une brise rafraîchissante loin des clichés du genre. De son pinceau, Claire Duvivier nous dépeint un monde à la consistance et à la cohérence presque palpables, qu’elle construit par petites touches subtiles pour un résultat qui n’en est que plus plausible et beau.

On y suit le récit, par lui-même, de la vie de Liesse, jeune natif de l’Archipel qui parvient à décrocher un poste de secrétaire d’une ambassadrice de l’Empire. Le portrait intimiste, humble et émouvant, à échelle humaine, d’un personnage dans les coulisses de l’Histoire, dont la faible importance en regard des événements ne lui donne que plus d’épaisseur et de place pour nous toucher. Les rouages se mettent en place presque imperceptiblement, et pourtant les pages s’avalent à toute vitesse à mesure que la tension narrative monte, que la fable évolue pour prendre des allures de conte philosophique et aborder avec intelligence et habileté, au détour d’un chemin de vie, d’un aléa du destin, les thèmes de l’Autre, de la tolérance, du déracinement, de l’acculturation, des liens entre les peuples et les générations, de l’Histoire (ce qui la fait, la défait, comment la raconter, comment lui pardonner…).

Un roman qui sait prendre le temps et son lecteur par la main, tout en délicatesse, pour tisser du lien et bâtir des ponts. Il mérite amplement qu’on lui donne sa chance, si vous aimez Robin Hobb, Ursula le Guin, Patrick Dewdney ou Stefan Platteau certainement, et si vous n’êtes pas amateur d’imaginaire en temps normal, c’est peut-être le livre qui vous réconciliera avec !

– Nikita –